Nous avons appris que le ministre des affaires sociales a entrepris, suite a la demande de certaines personnes qui se prétendent représenter les TRE, mais en réalité ne représentent qu’eux mêmes, les démarches de mise en place du Haut Conseil des Tunisiens à l’Etranger dont l’acronyme est « HCTE ». Pour rappel , le haut Conseil des Tunisiens de L’Etranger a été institué par la loi de 2016. Cette loi précise les compétences et la composition de cette instance, ainsi que son rôle dans la prise en charge des affaires des Tunisiens à l’Etranger. Ceux qui ont suivi tout le travail et l’engagement des membres de l’équipe des chargés de missions, qui ont travaillé en 2013 et 2014, sur l’élaboration du projet de mise en place d’un haut conseil des Tunisiens à l’étranger, et toutes les difficultés qu’ils ont enduré de la part des responsables de l’époque, comprennent aujourd’hui l’importance symbolique de cette instance. Aujourd’hui plusieurs personnes s’engagent a demander l’installation du HCTE, après presque cinq ans de tergiversations , au mépris de la représentativité effective des TRE et de leur rôle , de la place aussi qu’ils doivent occuper dans l’espace public Tunisien. En agissant ainsi ils hypothèquent les chances des TRE de devenir un jour l’interlocuteur des autorités Tunisiennes et un acteur incontournable dans le changement en Tunisie. Pour comprendre la situation examinons les éléments suivants:
Les compétences du HCTE:
La loi prévoit d’attribuer au HCTE les compétences suivantes.
- Rassembler et représenter tous les ressortissants tunisiens résidant à l’étranger sans distinction d’origine régionale, ethnique, religieuse, sociale, de sexe et de profession ou d’opinion.
- Promouvoir partout la défense des droits et intérêts des Tunisiens de l’extérieur et leur porter assistance dans le respect de la législation et de l’ordre public.
- Assurer le lien avec l’Autorité publique de Tunisie d’une part et une ouverture sur les Autorités locales du pays de résidence d’autre part.
- Favoriser et valoriser la contribution des Tunisiens de l’extérieur dans tous les aspects du développement économique, environnemental, social et culturel.
- Assurer la participation active de la diaspora aux affaires publiques de la Tunisie.
La composition du conseil prévue par la loi :
- 18 membres représentants des associations des Tunisiens à l’Etranger
- 18 membres de droit qui sont les députés des élus dans les circonscriptions electiorales dans les pays d’accueil, qui siègent au sein de la commission parlementaire des Affaires des Tunisiens à l’etranger.
- 8 membres représentants les personnalités qualifiées des Tunisiens à l’Etranger et choisies par le secrétaire d’état de l’immigration et des tunisiens à l’Etranger
- 3 Membres représentants des organisations de la société civile :
- 1 membre du syndicat patronal les plus représentatif ( UTICA)
- 1 membre du syndicat des travailleurs le plus représentatif (UGTT)
- 1 Membre du syndicat agricole le plus représentatif.
Il est doté d’une instance de gouvernance qui se compose :
- D’un président (avec un profil spécialisé dans les politiques publiques dédiées à l’immigration) et de deux vice-présidents élus parmi les membres dont un issu des associations locales œuvrant dans le domaine de l’immigration.
- D’un directeur général, nommé par le ministre de Tutelle, qui a pour mission entre autre de fixer l’ordre du jour des réunions et d’en être le rapporteur, et dont la nomination est validée par le président de la république
Observations :
- Non seulement le HCTE n’a qu’un rôle consultatif, mais au regard de ses compétences, le haut conseil rentre en conflit d’intérêt avec l’OTE, car les politiques publiques des Tunisiens à l’Etranger, et la prise en charge de leurs affaires sociales sont dévolus à l’OTE, et précisées par l’Article.14 de la loi n° 60-88 du 2 juin 1988) portant création de l’Office des Tunisiens à l’Etranger et énoncé comme suit :
« Il a pour mission générale d’offrir des services aux Tunisiens résidents à l’étranger : services administratifs, médiation sociale et interculturelle, activités éducatives et animation culturelle, accompagnement des changements de situation.
L’OTE maintient le dialogue entre les Tunisiens expatriés et les institutions nationales, grâce à son réseau d’attachés sociaux déployés dans les pays d’émigration et ses délégations régionales qui couvrent tous les gouvernorats tunisiens.
L’OTE resserre les liens entre les membres de la diaspora. Dans les villes abritant une forte communauté tunisienne,
L’Office des Tunisiens à l’Etranger conçoit et met en œuvre des programme adaptés aux différentes composante de la diaspora : femmes, familles, étudiants, générations issues de l’émigration, compétences tunisiennes à l’étranger »
- Il rentre en conflit de competence avec l’observatoire National de la Migration, dont le Décret n° 2014-1930 du 30 avril 2014, portant création de l’observatoire national de la migration et fixant son organisation administrative et financière, précise les missions de cet organisme : « mission d’analyse, de coordination avec les différents intervenants et les institutions nationale en matière de migration, de concevoir et d’évaluer les programmes et les politiques visant à la promotion de la condition des migrants et la consolidation de leur attachement au pays et leur contribution aux efforts de développement et la gestion des flux, les statistiques et la prévision des départs et des retours. »
- La Direction Générale de la Coopération Internationale en Matière de migration, est aussi en conflit de compétence avec le HCTE sur l’étude, les observations et les avis sur les conventions à portée internationale et la prise en charge des politiques publiques des Tunisiens à l’Etranger tant dans les pays de résidence que dans le pays d’origine.
- Nous constatons le silence de la loi sur le statut des TRE qui siègent au sein du conseil (Statut de salariés ou de Bénévoles ?)
- Que devraient ils faire au cas où ils seraient encore salariés dans leurs pays de résidence ?
- Il nous semble que la présence des 18 députés est superflue, car ils sont élus dans des circonscriptions électorales dans les pays de résidence et représentent des partis politiques, leur missions au sein du Haut Conseil risque d’être considérée comme une tribune à des points de vues et des stratégies politiques partisanes et par la même occasion on risque de voir les décisions concernant les TRE empreintes de prise de position partisane et cela induit une certaine instrumentalisation du public cible.
- Le travail du conseil est apolitique et consultatif, il doit se baser sur un partenariat et un travail en réseau avec toutes les parties concernées par la migration et la place que doivent occuper les TRE en tant qu’acteurs économiques. La présence des ces élus au parlement et leur participation à la commission des affaires des Tunisiens à l’étranger pourrait être complémentaire avec les travaux du Haut Conseil et serait à la base d’un partenariat de concertation et d’échange sur les projets qui touchent à la vie des membres de la diaspora et à leur contribution.
Lors de l’appel à candidature que le ministère à lancé aux associations représentatives des TRE. Plusieurs d’entre elles ont alors présenté leurs dossiers et ont fait acte de candidature. Jusqu’à ce jour, elles n’ont reçu aucune réponse sur la suite qui à été donnée à leurs dossiers, alors qu’elles remplissaient les critères d’éligibilité prévus par la loi et dont nous vous rappelons le contenu :
- L’association qui souhaite déposer sa candidature doit être déclarée au journal office du pays de résidence, et doit avoir la personnalité morale, c’est-à-dire une existence juridique.
- Elle doit avoir un bureau élu.
- Elle doit fournir des bilans d’activités sur au moins deux exercice.
- Elle doit avoir une ancienneté d’activité dans le domaine de la migration.
Qu’en est il aujourd’hui de ces candidatures ?
Préconisations
Pour donner au haut conseil l’amplitude des missions qui lui seraient conférées, il faudrait envisager un projet de loi modificatif afin de rendre les critères d’éligibilité et la feuille de route des compétences du Haut Conseil plus conforme aux attentes et aux préoccupations des TRE.
- Nous exprimons aussi le souhait de voir une liste des associations candidates publiées par les services compétents afin de rendre la démarche lisible et transparente pour les TRE.
- Il serait également louable de prévoir une réponse motivée à donner aux associations dont les dossiers de candidature ne sont pas retenus, avec indication des moyens et des délais de recours et des tribunaux compétents auxquels les recours doivent être adressés.
- Il serait aussi nécessaire que les autorités Tunisiennes engagent une réflexion en profondeur sur une révision générale des politiques publiques et ce afin de rendre les institutions plus complémentaires les une des autres et décloisonner les administrations par une dématérialisation plus importantes.
- Rendre les procédures et les démarches plus accessibles à distance et moins laborieuses, faciliterait l’adhésion des TRE et donnerait plus de transparence dans la traitement des demandes.
- Engager une réflexion avec les experts de la diaspora sur les causes de la rupture de confiance entre les administrations Tunisiennes et les TRE, et construire des solutions pour restaurer cette relation de confiance dont les conséquences éloignent de plus en plus les TRE de leur pays, sans parler des générations issue de cette diaspora.
La restauration de la relation de confiance participerait de manière indirecte au changement et aurait un impact positif sur les structures représentants les TRE, et les encouragerait à faire preuve d’unité et de cohésion pour élaborer un projet de plateforme de propositions qui reflètent la réalité des attentes. Elles auraient ainsi l’opportunité de participer à la mise ne place de l’institution en question et d’affirmer leurs statuts de structures fédératrices et représentatives des TRE, sans autres considérations politiques ou partisanes.